Nous mettons un réveil à 5h15 du matin, afin d'aller assister à l'aumône des moines qui a lieu tous les jours à l'aube. Encore à moitié endormis, nous sortons dans la nuit pour constater que la rue commence déjà à s'animer. Les premières grillades sont lancées et les stands du marché du matin prennent place dans la ruelle. Les tuk-tuk sont en service, mais remplis uniquement par des lao, et sur le trottoir quelques grands mères ridées attendent la venue des moines. Nous descendons la rue qui mène jusqu'au fleuve, nous arrêtons sur un muret près de l'eau. Je vais marcher un peu plus loin afin de rester éveillée, et, devant le restaurant d'hier soir, se trouve le grand père d'Ome, un panier de riz gluant à la main. Je le salue et lui demande l'autorisation de nous joindre à lui, ce qu'il accepte en souriant. Nous revenons tous ensemble, et nous installons sur la natte qu'il a déplié pour nous sur le trottoir.


Le ciel commence à s'éclaircir, on entend résonner le gong, et le premier groupe de moine apparaît. Ils passent solennellement, recueillant tout au long de leur chemin les offrandes des fidèles qui constitueront leur repas de la journée.

Les voilà qui arrivent à notre hauteur...

Le grand père d'Ome donne à chacun une petite portion de riz gluant façonnée à la main, qu'il dépose dans le récipient de métal qu'ils portent en bandoulière et dont ils font coulisser le couvercle d'un geste gracieux.

Plusieurs groupes se succèdent, réitérant le même rituel, et nous observons en silence ce ballet de robes oranges et safrans perpétuant la tradition de l'aumône. Nous sommes chanceux et honorés de pouvoir y assister au côté d'un habitant de Luang Prabang, et non pas de l'autre côté du trottoir où passent quelques touristes dégainant leur appareil photo... Après le dernier groupe, où les moines sont plus âgés, le jour est complètement levé. Nous remercions et saluons notre ami lao, et retournons dans notre chambre pour finir notre nuit de sommeil.


Après un réveil difficile et un petit déjeuner acheté au marché, nous allons prendre un bateau pour traverser jusqu'à l'autre rive du Mékong, là où les collines ont la forme d'un prince et d'une princesse endormis.

Nous commençons la marche sur un chemin rénové par l'Unesco, qui traverse des villages où de vieilles grand mères surveillent le passage des poules et des chiens. Il fait déjà chaud, et nous arrivons doucement au Wat Long Khong, réputé pour ses fresques intérieures. Deux petits garçons, hilares comme des lutins farceurs, viennent à notre rencontre, nous proposant avec leurs trois mots d'anglais, de nous faire visiter la grotte près du temple. Nous achetons les billets et commençons par visiter l'édifice principal. Les fameuses fresques sont jolies et détaillées, même si elles sont par endroits totalement délabrées. On y voit des éléphants, des monstres marins, des musiciennes et beaucoup d'autres personnages et animaux.


Nous ressortons et suivons nos deux chenapans, l'un au tee-shirt spiderman et l'autre de pikachu, qui nous guident en chantant à tue-tête. Ils nous ouvrent la grotte sacrée et, à la lueur de leur lampe torche, nous montrent statues de bouddha et stalactites irisées. Nous descendons quelques marches glissantes pour accéder à une autre salle où volent des chauve-souris. L'un des petits diables récupère un bras d'une statue en bois et nous la tend en criant "sabaydi sabaydi !" (bonjour). C'est la première fois que nous serrons la main de bouddha, et ça les fait bien rire ! Après cette visite unique en son genre, nous donnons un petit pourboire à chacun de nos petits guides et reprenons le chemin en sens inverse.


Pour le déjeuner nous improvisons en achetant des nouilles emballées dans des feuilles de bananier sur un étal, le proprio nous nettoie une table pour nous installer tandis que sa fille va chercher des baguettes et des bouteilles d'eau. Après ce repas léger, le ciel est de plus en plus chargé. Nous faisons une pause dans un café au bout du chemin avant de nous lancer tout de même dans la balade qui nous conduit à un village de potier.


En chemin nous croisons plusieurs troupeaux de petites chèvres, admirons le panorama sur les montagnes et arrivons finalement aux maisons des potiers. Des morceaux de bois sont disposés comme des tipis dans la cour et un foyer creusé en profondeur dans la terre dégage une chaleur brûlante lorsque nous nous en approchons. Des jarres déformées, n'ayant pas résisté à la cuisson, sont posées près des arbres. Plus loin on trouve les alignements de pots, cruches et lanternes destinées à la vente.


Dans la deuxième maison un vieux potier est à l'oeuvre. Nous nous approchons pour admirer son fascinant travail. Il monte d'abord des colombins puis les façonne au tour mécanique qu'il actionne au pied, ou qu'une aide fait tourner pour lui. De ses mains habiles nait un petit vase, dont il travaille la collerette avec un chiffon humide puis finit en appliquant un motif linéaire sur le col à l'aide d'une roulette. Et voilà, la pièce détachée à l'aide d'un fil est prête à être séchée puis cuite.

Plus loin un homme plus jeune est en train de finir une énorme jarre dans un travail impressionnant de précision. La touche finale est appliquée avec une roulette à motifs floraux et l'ouvrage est transporté avec précaution près des autres.


La pluie commence à tomber lorsque nous quittons le village. Peu tentés par une marche de retour sous la pluie nous trouvons un bateau pour nous faire traverser sur l'autre rive. A partir de là nous allons marcher jusqu'à rejoindre la guesthouse à Luang Prabang, où, après une bonne douche, nous attendons le minibus.

Il arrive avec du retard, et nous dépose à la gare routière sous une pluie battante. Nous sautons dans le bus de nuit et découvrons avec effarement que les couchettes "VIP", présentées comme de confortables lits doubles, sont en réalité minuscules et les garçons ne peuvent même pas s'y allonger dans la longueur !

En plus il pleut de mon côté... Le bus démarre à toute allure, sur une route pleine de virages et d'ornières, nous secouant dans tous les sens. Toute une aventure ! Nous pouvons oublier le repas du soir censé être compris dans le prix, de toute façon nous ne sommes pas en état d'avaler quoique ce soit... Les lumières s'éteignent et nous tentons de dormir pour oublier notre inconfort...